Alfred Kuen citant Ronald Youngblood résume très bien pourquoi beaucoup de chrétiens ont cru et croient toujours que le déluge a été mondial. (p. 130 et 131 de son Encyclopédie des difficultés bibliques). Voici quelques raisons :

  • La profondeur des eaux telle qu’elle est décrite dans la Genèse demande une extension universelle du déluge.
  • L’eau s’écoule toujours vers le niveau le plus bas. Puisque les plus hautes montagnes du Moyen Orient (5000 m d’altitude) étaient recouvertes par l’eau, elle devait aussi couvrir les plus hautes montagnes du reste du monde.
  • Le déluge a duré plus d’une année, il a donc du être universel.
  • La géologie du déluge implique son extension universelle
  • Puisque l’humanité toute entière fut détruite, sauf Noé et sa famille, le déluge doit avoir été universel.
  • Des récits du déluge se trouvent dans toutes les cultures du monde, ce qui prouve bien son caractère universel
  • 2 Pierre 3 :5-7 présuppose que le déluge de Noé était universel.

S’appuyant sur une lecture littérale de ce texte comme de toute la Genèse, les créationnistes ont élaboré une théorie « scientifique » qui contredit toute la géologie. Jean Humbert, chrétien évangélique, professeur agrégé de science naturelle en classe préparatoire décrit le scénario créationniste et catastrophiste dans Création Evolution, faut-il trancher ?

« Les créationnistes admettent que l’univers -homme y compris- a été créé par Dieu en 6 journées de 24 heures. Quand ? Il peut y avoir de cela environ 10.000 ans. Cette création fut parfaite.

Le monde d’alors était devait être bien différent de l’actuel. Une couche invisible de vapeur d’eau, située dans la haute atmosphère, fait régner un climat uniformément chaud et humide sur tout le globe ; point de nuages, ni de pluies. Les montagnes sont moins hautes ; les océans beaucoup moins vastes et moins profonds. Les traces de ce monde antédiluvien ont probablement disparu.

Adam et Eve vivent dans le jardin d’Eden. Ils succombent à la tentation. Leur chute a pour conséquence la malédiction de Dieu qui s’abat sur eux et sur toute la création qui s’en trouve faussée : la violence fait son apparition, le sol produit de mauvaises herbes, la mort apparaît.

Le péché poursuit son œuvre. A cause de la corruption croissante des hommes (déjà répartis sur le globe), Dieu décide d’anéantir la totalité de l’humanité au Moyen d’un déluge universel. Il en avertit Noé qui construit l’à l’avance l’Arche, un immense vaisseau de 20. 000 tonnes (150m*25m*5m), capable d’héberger 30 000 à 35 000 bêtes, avec la nourriture pour un an, sans oublier les quatre couples humains.

Peu avant le déluge, obéissant à leur instinct migrateur, les animaux arrivent par couples dans l’arche (ils pouvaient tous vivre dans la région à cause de l’uniformité du climat mondial). Dieu ferme la porte de l’arche et le déluge commence. Il va durer plus d’un an. La couche de vapeur se condense en pluie ; des flots d’eau chaude sortent sous pression de grandes poches situées sous la croûte terrestre. Les eaux montent et recouvrent les plus hautes montagnes. Le cataclysme provoque une effroyable érosion et tout ce qui est charrié amène le dépôt, en un an, de toutes les roches sédimentaires (primaires, secondaires, tertiaires des géologues). Les fossiles que l’on y trouve sont les restes des êtres qui vivaient lors du déluge. En même temps, surgissent d’énormes masses de laves volcaniques qui sortent par les fractures de l’écorce terrestre ; le tout est accompagné de séismes et de soulèvements de montagnes.

A la fin du déluge, la topographie du globe a complètement changé ; les montagnes sont plus hautes les océans plus vastes et plus profonds, afin de loger l’eau venue de la croûte terrestre. Les climats différenciés apparaissent, ainsi que les phénomènes météorologiques, car l’axe du globe s’est désormais incliné.

De vivants, il ne reste que les habitants de l’arche : un couple par espèce animale, Noé, sa femme, leurs trois fils et leurs épouses. L’arche se pose sur le mont Ararat. Lâchée, la colombe rapporte une feuille d’olivier. Les hommes et les animaux vont repeupler la terre. Les marsupiaux gagnent l’Australie avant qu’elle ne s’éloigne ; les êtres polaires émigrent vers l’Arctique ou vers l’Antarctique.

Le déluge a probablement eu lieu vers 7000 avant notre ère.

Après l’épisode de la tour de Babel, les hommes se dispersent à la surface de la terre. Tous les humains actuels sont les descendants de l’un ou de l’autre des trois fils de Noé. »

Ce scénario paraîtra bien sur totalement rocambolesque à ceux, croyants ou non, qui ont un minimum de connaissance en géologie et en biologie, il a pourtant séduit beaucoup de chrétiens, outre Atlantique en particulier. Les motivations de ceux qui y croient sont très louables : le respect de l’autorité de la Bible de son inspiration. Cette interprétation ultra littérale repose pourtant sur des préjugés théologiques dont ces partisans ne sont pas conscients : ils pensent que pour que la Bible soit crédible d’un point de vue théologique, tout ce qui s’y trouve doit être exact selon les critères scientifiques et historiques du XXIème siècle. Ce n’est pas l’avis de tous les chrétiens évangéliques, loin s’en faut…c’est ce que nous verrons dans l’article suivant!