Comme l’a souligné Denis Lamoureux dans Evolutionary Creation, l’un des obstacles théologiques majeurs à l’acceptation de l’évolution comme mécanisme divin de création est le rapport théologique de beaucoup de chrétiens à la mort physique, et notamment ce que Paul en dit.

L’évolution est un mécanisme dans lequel la mort physique joue un rôle nécessaire et déterminant. Denis Lamoureux consacre à cette question très délicate un grand nombre de pages de son ouvrage. Il montre comment on peut lire le texte biblique de manière parfois anti intuitive mais tout à fait cohérente. Il serait très difficile de résumer une pensée aussi complexe dans le format d’un blog. Ses conclusions rejoignent assez celle des auteurs de l’ouvrage ci-dessous!

Luc Plateaux, ancien professeur de biologie animale et d’évolution à la faculté de Nancy a eu la gentillesse de me faire parvenir gracieusement un exemplaire de « Pour lire la création, l’évolution » aux éditions du Cerf. Il a coécrit cet ouvrage avec Christian Montenat, directeur de recherche au CNRS (géologie), et Pascal Roux, prêtre et Polytechnicien. Cet ouvrage est de très grande qualité, et j’en recommande l’étude.

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« La mort de l’homme est-elle un châtiment ? »

 

  • La mort physique, conséquence de la « chute » ?

 

« Arrêtons-nous à la cause principale de l’angoisse humaine. « Oui tu es poussière et à la poussière tu retourneras » (Gen 3,19).

Il est certain que pendant des siècles la conscience chrétienne a compris la mort telle qu’elle était vécue, dans l’angoisse et la solitude, la tentation du doute et même de la dissolution dans le néant, comme une conséquence du péché originel. Adam et Eve étaient les grands responsables. Sans leur désobéissance l’homme aurait été immortel, établi pour toujours dans la justice originelle. Voilà de façon simplifiée le schéma de ce qui était couramment enseigné. »

 

  • La mort physique, conséquence inévitable de la création ?

 

« Depuis une soixantaine d’années, et plus officiellement depuis vingt ans en milieu catholique, une distinction s’est établie entre la mort physique, phénomène biologique, et l’expérience existentielle et spirituelle de la mort. De plus en plus nombreux sont les penseurs chrétiens qui considèrent la mort physique, c’est-à-dire l’arrêt des fonctions vitales puis la disparition du cadavre comme un phénomène naturel, intrinsèque à la vie, et même indispensable à l’évolution de l’espèce. L’universalité du phénomène permet de l’intégrer au processus même de la création et interdit d’en faire un accident malheureux, simple conséquence d’une brouille non programmée entre Dieu et sa créature ! […]

 

L’idée est familière aux scientifiques, elle l’est peut-être beaucoup moins aux chrétiens de culture traditionnelle. »

 

  • La mort dans le langage biblique

 

« D’où vient le blocage ? De ce que la Bible parle toujours de la mort non comme d’un phénomène naturel à toute espèce vivante mais comme du drame que vit l’homme pécheur.[…]

 

C’est de cette mort là dont l’Ecriture nous parle en la liant à une rupture fondamentale qui remonte aux origines lorsqu’Adam, l’homme se coupa de l’intimité de Dieu… »

  • Le vrai lien entre la mort physique et le péché

 

« Il y a bien un lien profond entre la mort dramatique de l’homme et la culpabilité qui s’enracine dans la rupture originaire. C’est cela que les chrétiens savent depuis toujours, car « au commencement il n’en était pas ainsi » (Mat 19,8).

C’est à dessein que nous appliquons très librement cette Parole du Christ sur le mariage à propos de la mort de l’homme, pour mieux souligner la discrétion totale de notre Seigneur sur l’origine coupable de la mort de l’homme !

Ainsi s’éclaire ce chapitre 3 de la Genèse sur l’ultime conséquence de la chute : la mort devenue une tragédie. […] »

 

  • L’échec du « concordisme »

 

« Toute tentative d’établir une correspondance étroite entre le temps et l’espace construits par la paléontologie moderne d’une part et l’épisode de la chute d’autre part, serait dénuée de signification intellectuelle et c’est à juste titre que les exégètes refusent ce qu’ils appellent du concordisme. »