Les cours de Physique de Richard Feynman

J’ai récemment écouté une série de 7 conférences qui ont donné lieu au livre La nature de la physique, de Richard Feynman. Données en 1963, elles sont toutes sur YouTube, en anglais, et furent transcrites dès 1965. Je recommande vivement l’ensemble aux non scientifiques désireux de se faire une idée de la physique contemporaine.

 

Les électrons selon Feynman

L’une de mes préférées est la sixième, « Probabilité et incertitude. La description quantique de la nature ». En parlant des électrons, Feynman déclare :

Ils ont leur propre comportement, inimitable, qu’il faut appeler, techniquement, un comportement quantique. Ils se comportent d’une façon qui ne ressemble à rien de ce que vous connaissez. L’expérience que vous avez des choses que vous avez déjà vues est incomplète. Le comportement de la matière à très petite échelle est différent, tout simplement.

 

En d’autres termes, il est tout simplement impossible d’expliquer comment se comporte une particule élémentaire à l’échelle microscopique. « Impossible » ici n’est pas une figure de style. C’est bien réel, et en fait, c’est normal.  Toute explication, toute illustration de quoi que ce soit, ne peut utiliser que des concepts issus de notre expérience quotidienne. Par exemple « onde » ou « petite bille ». Ces notions se sont imposées à nous car à notre échelle, c’est-à-dire « pas trop petit », « pas trop vite », les choses se comportent ainsi. La panoplie d’images à notre portée ne peut comporter que ce que nous voyons en regardant par la fenêtre. C’est forcé.

Quand la physique a commencé à aller au-delà de ce qui ne va « pas trop vite », elle est tombée sur la relativité, très contraire à l’intuition. Et quand elle est allée au-delà de ce qui n’est « pas trop petit », elle est tombée sur le quantique, également très contraire à l’intuition. Quand on y pense, ce n’est pas surprenant. Notre intuition ne se forme tout simplement pas à ces échelles.

Feynman décrit ensuite la célèbre expérience des fentes de Young. Il s’agit d’une expérience assez simple que l’on peut faire avec des électrons, des photons, bref, n’importe quelle « bidulon »[1]. Lisez son explication par Feynman et vous verrez, on ne peut s’empêcher de se rabâcher, « mais comment peut-il en être ainsi ? ». Ecoutons Feynman à ce sujet,

La difficulté, en fait, est psychologique et réside dans ce tourment perpétuel que vous causent des réflexions comme « mais comment peut-il en être ainsi ? », qui reflètent un désir incontrôlé, mais parfaitement vain, de revenir à une vision familière…
Si vous pouvez l’éviter, ne restez pas là à vous répéter « mais comment peut-il en être ainsi ? » car vous serez submergés, noyés et entrainés dans un cul-de-sac dont personne encore n’a réussi à s’échapper. Personne ne sait comment cela peut se passer ainsi.

 

J’ai lu ce livre quand j’avais 20 ans. Aucune expérience ne m’avait fourni les outils qu’il m’aurait fallu pour appréhender le réel comportement des électrons. Et le malaise permanent ressenti en découvrant tout cela venait précisément d’un effort constant et vain de m’accrocher à quelque chose de connu. 33 ans plus tard, je ne visualise toujours pas ce qu’est vraiment un électron. J’ai simplement admis que je ne le peux pas.

Le plus important à comprendre dans cette affaire est peut-être que dans un certain sens, on ne peut pas comprendre. Nous ne sommes pas câblés pour cela, de la même manière que nous ne sommes pas câblés pour visualiser un espace à 10, ou même 2, dimensions. « 2 dimensions ? Mais c’est un plan ! », me direz-vous. Non. Ce que vous « voyez », c’est un plan… immergé dans un espace 3D. Un tableau 2D au mur d’une pièce 3D, par exemple. Pas un plan, et absolument rien d’autre. Notre cerveau ne peut faire cela que pour un espace 3D.

L’incompréhensibilité de l’électron est plus fondamentale qu’on ne l’imagine.

 

Et Dieu dans tout ça ?

Ça, c’est pour un électron. Et Dieu dans tout ça ? Si je dois abandonner l’espoir de traduire la nature réelle d’un pauvre électron en termes qui me sont familiers, il me semble évident que la même chose est valable pour Dieu. Le passage biblique du prophète Esaïe (Es 55.8) me vient à l’esprit,

Mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne sont pas mes voies.

Pourtant, de même que je peux, dans certains cas, m’accrocher tant bien que mal aux notions d’onde ou de particules pour avoir une idée de ce qu’est un électron, il me semble que Dieu nous a donné des moyens d’imaginer qui il est. La Nature, la Bible, et surtout, Jésus.

 

 

Crédit illustration : The  Nobel Foundation 

 


Notes

[1] Comme le dit Feynman, « Les électrons se comportent exactement comme les photons ; ils sont tous loufoques, mais exactement de la même façon. »