Au cœur et à la naissance de l’humanité se sont développées trois facultés structurantes:

la création de l’art visuel, le développement d’un langage articulé et la structuration d’une religion [1].

 

La psychanalyste et écrivaine Marie Darrieussecq dit que la religion « la dérange », que c’est un « fléau mondial » et qu’elle préfère ne pas y croire « par choix »[2].

Pourquoi cette animosité du phénomène religieux ? Les anthropologues croient que la spiritualité est une dimension intrinsèque de l’humanité naissante. En proposant des règles et les rituels pour vivre ensemble, le phénomène religieux fut dès le départ un instrument de pacification.

Alors, quel est le problème? Le vrai fléau, c’est l’instrumentalisation de la religion en vue du pouvoir. C’est la récupération qu’en font certains pour dominer les autres. Autrement dit, c’est lorsqu’on récupère une chose bonne et nécessaire pour faire du mal, pour écraser ou brimer d’autres individus.

 

Le problème c’est l’abus, pas le phénomène religieux en soi. Par exemple, Jésus a dit: « aimez-vous les uns les autres » et « Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit et enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit. »[3]. La pierre angulaire c’est l’amour. Le fait d’avoir des règles morales et des rituels marque une cohésion et une identité. Ce n’est pas une contrainte, quoi qu’en disent certains. Le christianisme est inclusif. Il ne force personne à croire que Jésus est le seul chemin pour être sauvé et à suivre son enseignement.

 

Le phénomène religieux est inéluctable. Il est l’expression de croyances et de convictions partagées. C’est la manifestation tangible du besoin et du désir de vivre dans un monde qui a du sens au plan individuel et social. Les églises, par exemple, servent à relier les individus ensemble, à créer une cohésion entre les générations, à fournir un code de conduite et attribuer une valeur sacrée aux individus. Elles ne font pas seulement apporter des règles et des rituels contraignants.  Cette vision péjorative et réductrice que certains véhiculent n’est pas adéquate. Dans le pire des cas, elle prétend que toutes les religions sont fausses, et ce faisant, elle exprime un point de vue religieux aux accents totalitaires.

 

Je terminerai avec cette remarque : notre société a pris depuis plusieurs années une tendance à suspecter le phénomène religieux. Plusieurs le méprisent ou l’infantilisent. Mais quel est le résultat ? Dans quelle société vivons-nous ? Les individus s’en trouvent-ils plus heureux ? Les couples plus forts ? Les adolescents plus enthousiastes ? Il semble que la crise sanitaire montre les limites de l’individualisme et le besoin d’appartenance à une communauté d’entraide, un lieu qui offre de l’espoir, du sens et des liens significatifs.

 

 


Notes

[1] Emmanuel Anati, La religion des origines, Hachette, 1995, p. 9

[2] Tiré d’une entrevue disponible sur YouTube : Boris Cyrulnik se livre un exercice fascinant dans son livre La Psychothérapie de Dieu, 15 septembre 2017 sur la chaîne La Grande Librairie

[3] Jean 13.34 et Matthieu 28. 19-20

 

 

crédit illustration :  cybernesco