Dans un contexte où il est de bon ton d’associer religion, fanatisme et violence, l’article de recherche qui vient de paraître dans la prestigieuse revue PNAS  (Proceedings of the National Academy of Science) du 12 janvier 2016*, a retenu mon attention.

 

Il y a de nombreux conflits dans le monde entre groupes religieux, et un grand nombre d’actes de violence sont perpétrés sous le couvert d’une identité religieuse. De ces faits à l’idée que la croyance religieuse promeut le tribalisme, l’intolérance et la violence envers les non-croyants ou le groupe religieux concurrent, il n’y a qu’un pas que beaucoup sont tentés de franchir. Mais est-ce vraiment le cas ?

 

Des chercheurs en sciences sociales de New-York, Paris, Oxford et Pittsburg ont testé cette hypothèse dans le cas du conflit Israélo-Palestinien qui est marqué par une distinction religieuse  entre les parties du conflit.

 

Sur un échantillon de 555 jeunes palestiniens musulmans pratiquants, les chercheurs ont testé la valeur attribuée à la vie d’un juif, soit de leur propre perspective soit quand ils se plaçaient dans la perspective d’Allah. A cet échantillon de personnes il leur a été raconté deux histoires relatant une situation extrême où un homme palestinien doit se sacrifier pour sauver des enfants, l’une concernant des enfants juifs, l’autre des enfants palestiniens (racontées dans un ordre aléatoire). Pour chacune des histoires, ils doivent décider si le Palestinien doit se sacrifier ou non. Cette expérience est effectuée deux fois, l’une où les personnes interrogées doivent décider de leur propre perspective, l’autre où ils doivent se placer dans la perspective d’Allah.

 

Dans ces deux expériences, la majorité des décisions ne sont pas biaisées c’est à dire que le choix est le même que les enfants soient Palestiniens ou Israéliens. Néanmoins on observe que la proportion de choix qui privilégient les enfants palestiniens est plus forte quand les personnes ne se réfèrent pas à Allah que quand ils s’y réfèrent (42% contre 30%) suggérant ainsi que la religion infère une valeur humaine plus universelle : la référence à Allah ne conduit pas une image dévaluée de la personne qui n’est pas musulmane mais au contraire génère ou encourage le sacrifice pour elle!

 

 

* Ginges J, Sheihk H, Atran S, Argo N (2016) Thinking from God’s perspective decreases biased valuation of the life of nonbeliever. PNAS 113 (2), 316-319.