Pete  Enns, auteur de cet article est un théologien évangélique, auteur de plusieurs livres et de commentaires, notamment de L’inspiration et l’incarnation : les évangéliques et le problème de l’AncienTestament. L’original de cet article est consultable ici.

La Bible et l’évolution forment un mélange explosif pour certains chrétiens. Tout le monde paraît avoir une opinion, et peu sont neutres. La conversation devient vite chargée d’émotion.

Je laisse aux sociologues et aux psychologues le soin d’analyser la raison pour laquelle les gens réagissent comme ils le font. Mais laissez moi vous partager mes impressions.

Le débat est passionné parce que l’évolution fait peur. Certains chrétiens se sentent menacés parce que l’évolution défie quelque chose qui est plein de signification et qui est non négociable- leur compréhension de Dieu, de la réalité ultime, et comment les différents aspects de l’existence sont liés les uns aux autres et ont un sens.

La foi chrétienne donne stabilité et assurance et sens à notre vie, le monde est dans les mains de Dieu, notre existence n’est pas une blague cosmique. Nos vies et notre univers autour de nous ont bien un sens.

Notre foi nous donne un sens de cohérence.

Quand les gens sentent que leur sens de la cohérence est menacé, le conflit n’est pas loin. On ne dialogue plus mais on se protège. On cesse de se demander si quelque chose est vrai mais on réagit plutôt par peur. Et plus la menace est crédible, plus on « entoure les wagons » et on maintient à tout prix notre sens de la cohérence.

L’affirmation que des visiteurs extra-terrestre refusent le christianisme ne serait pas une menace. Nous accueillerions une telle nouvelle en la jugeant ridicule ou nous l’ignorerions. Mais c’est différent en ce qui concerne l’évolution. On ne peut pas contredire facilement se réalité. L’évolution rend compte du monde naturel de manière persuasive. Les scientifiques reconnaissent la très grande puissance explicative de ses affirmations.

L’évolution menace aussi les chrétiens qui ont l’impression de devoir lire toute la Bible de manière littérale. Devant une telle menace, la motivation à se protéger est grande.

En me basant sur des évènements récents, je crois que la première question que nous devrions nous poser n’est pas, comment réconcilier l’évolution et le christianisme. La première question : « de quelle façon pouvons nous aborder le sujet ? » Tant que les mécanismes de défense protectionnistes sont activés, la conversation ne peut pas commencer.

Ce qui est très dommage, c’est que beaucoup de personnes aimeraient bien que cette conversation puisse avoir lieu. Eviter la discussion pour maintenir la cohérence ne fera pas avancer les choses. Ainsi, on clôt la discussion au nom de la protection de la foi des masses. L’ironie est que l’échec de l’église à engager un dialogue ouvert en a conduit certains à rejeter la foi dans son ensemble. C’est ce qui arrive quand des réflexes protectionnistes l’emportent sur le fait de préparer l’église pour le futur.

La lutte pour le maintien de la cohérence de la foi chrétienne face à de nouvelles idées est aussi ancienne que le christianisme lui-même. Les discussions à propos de l’évolution n’en sont qu’un exemple.

Il n’y a pas de tempête plus parfaite que lorsque les traditions qui fournissent la cohérence à propos de la réalité ultime sont menacées. Pour certains chrétiens, l’évolution représente une telle menace, et la vigueur du débat en est le résultat. Mais beaucoup d’autres chrétiens sont en recherche et souhaitent ce dialogue ouvert. Nous ne pouvons à mon avis plus fuir une telle discussion.