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La doctrine du péché originel peut-elle s'écrouler ?


Partie 5 : L’arbre de la connaissance du bien et du mal pour fonder la liberté

Le commandement donné à Adam en Ge 2.17 s’avère être le fondement de la liberté et de la foi. Simultanément, il rend possible l’existence du péché puisque le commandement va susciter la convoitise (lire à ce sujet le commentaire de Paul « La loi est-elle péché ? » Rom 7.7-13). La loi, dit Paul, permet de connaître la convoitise. Elle l’a manifeste à nos propres yeux.

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Or la convoitise n’est pas encore le péché comme l’explique Jacques. Il prend soin de mentionner:  » Que personne, lorsqu’il est tenté, ne dise: C’est Dieu qui me tente… Mais chacun est tenté quand il est attiré par sa propre convoitise. » (Ja 1.13-15). Le commandement, et la convoitise qu’elle suscite, permet à la foi de s’exprimer, ou pas. Le commandement place l’humanité devant le choix de répondre ou non à la convoitise par le péché ou la foi. Pour que la foi puisse s’exprimer, il faut un commandement.

Le serpent joue alors le rôle de déclencheur dans le récit. Plusieurs voient la figure de « Satan » derrière celle du serpent. Dans le cadre du récit, cela ne peut être le cas pour la simple et bonne raison que l’auteur inspiré affirme explicitement que le serpent EST un animal des champs et qu’il a été formé par Dieu. « L’Éternel Dieu forma de la terre tous les animaux des champs et tous les oiseaux du ciel, et il les fit venir vers l’homme » (Ge 2.19). ET « Le serpent »était le plus rusé de tous les animaux des champs » (Ge 3.1). Certes il est aussi le symbole de tout ce qui dans la création, force naturelle ou spirituelle, vient menacer, tenter et susciter de l’adversité spirituelle, etc. La tentation est le moment charnière entre l’état d’innocence et l’état de conscience. Elle est le préambule à se connaître et à se fonder dans la liberté.

La question que j’invite le lecteur à se poser est celle-ci : le rédacteur du récit voulait-il montrer par cette mise-en-scène que l’adam nouvellement créé n’était pas encore « converti » au sens « évangélique » ? Qu’il était innocent, certes, mais pas encore réellement conscient de sa faiblesse et de son besoin de la grâce de Dieu ?

Avant le commandement, l’adam ne savait pas encore qu’il pouvait convoiter. Avant d’être placé devant un choix, il ne savait pas qu’il pouvait choisir sa destinée. Personne ne peut connaître l’amour inconditionnel de Dieu avant de l’avoir expérimenté. Dès lors, la figure du serpent devient nécessaire pour que l’humanité connaisse pleinement qui est Dieu. Non seulement pour révéler le drame intérieur. Mais pour révéler la grâce originelle: l’amour de Dieu depuis toute éternité, prête à se manifester dès le premier péché.

Le serpent est certainement une figure du mal, du tentateur (Job), celui qui teste, qui éprouve, le séducteur. Il veut condamner, diviser (dia-bolos). Il nous faut maintenant accepter que le serpent puisse loger dans un monde « très bon ». Il est l’épreuve nécessaire qui révèle la faiblesse humaine et son besoin de Dieu afin que l’homme connaisse pleinement la miséricorde et la grâce divine de sorte que son coeur puisse trouver paix et repos au coeur des épreuves.

Sans l’arbre de connaissance, sans commandement, il n’y a pas de serpent, il n’y a pas de test. L’homme est condamné à demeurer inconscient de son état de créature. Le serpent permet à l’homme de découvrir Dieu et de tout surmonter. Il montre que la création est  » très bonne » en ce qu’avec Lui elle peut tout surmonter et vaincre toute adversité. L’épreuve ou la tentation peut poindre, l’homme n’est pas sans ressource pour surmonter l’adversité et accomplir sa vocation.

Si Dieu envoie la tentation, serait-il complice du mal ? Aucunement pas selon Jacques. Pas de foi sans liberté. Pas de liberté sans la possibilité d’un choix. Dès qu’apparaît le commandement, apparaît aussi la liberté, et donc la tentation d’un second choix. C’est avec beaucoup de génie que le rédacteur de Ge 2-3 dépeint cette possibilité de péché sous les traits d’un serpent qui n’est ni divin, ni totalement humain, mais est issu de la création. L’auteur du récit place le serpent au tout début de la vie active de l’humain, dès après le commandement. Il signifie que la tentation suit inévitablement le commandement.

Et avons vu que l’auteur veut montrer qu’aucun humain ne peut résister seul à la tentation. Il a besoin du secours de Dieu.

Pourquoi Dieu permet-il que l’homme succombe dès la première tentation ? Simplement, parce que l’homme repentant à plus de valeur que l’homme innocent.

Le mal est permis puisqu’il a déjà été surmonté et vaincu en Dieu dès avant l’origine du monde. L’homme conscient de son imperfection, de sa faillibilité, de sa dépendance ontologique ne sera pas rejeté, au contraire. Il sera interpellé, questionné, poursuivi, gracié. L’homme conscient et repentant, découvrant la grâce divine, peut réellement entrer dans le projet divin. Dieu permet l’entrée du mal parce que celui-ci est inévitable pour toute créature (seul Dieu est parfait et infaillible) et parce qu’il est déjà surmonté par le pardon et la grâce de Dieu qui sera manifesté par la descente de Dieu dans le jardin, image de la croix.

 


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