La vérité scientifique et la vérité scripturaire peuvent-elles être réconciliées ?

par | 11 Mai 2013

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Qu’est-ce la vérité ?

Introduction

La vérité est une  notion de plus en plus complexe. L’épistémologie postmoderne met en doute la possibilité même d’obtenir la vérité ; certains philosophes déclarent qu’il n’existe pas de vérité. Cependant, très peu nombreux sont les scientifiques qui acceptent cette opinion pessimiste. La régularité des lois naturelles, ainsi que la manière prévisible dont les phénomènes naturels obéissent à ces lois leur fait croire à l’existence de la vérité. Ainsi, il est très difficile de trouver un véritable scientifique postmoderne.

Nous affirmons que l’on peut découvrir la vérité. Nous reconnaissons également la nécessité de toujours prendre en compte les désirs humains et les limitations quand on évalue des prétendues vérités. Beaucoup d’opinions pessimistes récentes ne sont que des inventions et sont en contradiction avec l’expérience humaine. La plupart des êtres humains ont assez confiance en la science pour voyager en avion ou subir des opérations chirurgicales.

Le progrès de la science nous a permis de mieux découvrir l’univers. De telles découvertes augment le  nombre de vérités scientifiques. Pour les croyants, ces vérités doivent être compatibles avec les vérités de la Bible. Nous sommes convaincus de la nécessité, mais encore plus de la possibilité de cette compatibilité. Ce qui nous limite est notre accès partiel à toute vérité, y compris aux vérités scientifiques et spirituelles.

 

Les découvertes scientifiques et la Bible

La Bible n’est pas un texte scientifique et ne doit pas être lue en tant que tel. La littérature scientifique est une forme de communication relativement récente et très spécialisée. La lecture de la Bible comme un texte littéral et scientifique rend incompatible la parole de Dieu et l’histoire du monde comme elle est conçue par les scientifiques. Pourtant, quand on lit les Écritures dans leur contexte approprié, ces incohérences n’apparaissent pas. Il est donc possible d’accepter les Écritures comme étant la parole inspirée de Dieu, même si elles ne répondent pas précisément aux questions scientifiques et font référence parfois au monde naturel en utilisant les connaissances de l’époque où elles étaient rédigées.

Voir « Comment aborder un passage de la Bible? » et « Quelle est la relation appropriée entre la science et la foi chrétienne ? »

 

La science et la foi : la réponse au comment et au pourquoi

On différencie la science de la religion en disant que les deux répondent à des questions différentes ou encore, qu’elles répondent à la même question mais de manière différente. Par exemple, le révérend John Polkinghorne donne deux  réponses différentes à la question de savoir pourquoi l’eau bout dans une bouilloire.1 La réponse scientifique serait que le gaz chaud fait bouillir l’eau.2 Une autre réponse juste mais non scientifique serait que l’eau bout parce que je veux me préparer une tasse de thé.3  Les deux réponses sont justes et les deux décrivent le phénomène de l’eau bouillante mais avec des points de vue différents. Les réponses qui se trouvent dans la Bible sont généralement non scientifiques mais elles sont toujours justes.

Cela ne veut pas dire que la Bible manque de vérité historique, objective ou scientifique. Par exemple, la Bible parle de l’existence de l’étoile de Noël et la science offre une explication possible de son origine.4 La résurrection de Jésus est un autre exemple où la Bible fait bien plus qu’expliquer le pourquoi d’un évènement ; elle montre de manière explicite la vérité historique de l’évènement. Polkinghorne résume la relation entre la science et la religion de la manière suivante :

« Ni [la science ni la religion] n’ont atteint la connaissance parfaite car l’exploration de la nature ne cesse de révéler de nouveaux horizons inattendus. De même, la réalité infinie de Dieu sera toujours hors de la portée de l’homme limité. Cependant, la science et la religion croient atteindre la vraisemblance, c’est à dire dessiner sur papier certains aspects de la réalité qui sont adaptés à certains objectifs mais pas à tous»5

La science ne pourra jamais répondre à tous les pourquoi de la foi. De plus, l’esprit limité de l’homme risque de ne jamais révéler tous les mystères de notre existence.

En conclusion, il faut reconnaître que l’on a besoin d’une certaine mesure de foi afin de pouvoir répondre aux questions scientifiques sur le pourquoi d’un évènement. Les réponses aux questions scientifiques supposent que les lois de l’univers sont constantes, où changent très peu, si de nouvelles spéculations sont prouvées.6 Cela nécessite la foi en la régularité des lois naturelles. Que l’on croit ou que l’on ne croit pas à l’existence d’un créateur, il faut avoir la foi que l’ordre universel est réel et fiable. Sans cette foi, la science ne pourrait rien expliquer.

L’erreur en science et l’auto correction

L’erreur fait partie de toute activité humaine, y compris la science ; la  technologie humaine est imparfaite et la compréhension humaine est incomplète. Tous ces facteurs contribuent à une connaissance limitée de la vérité absolue.

Cependant, la science se corrige. Les découvertes scientifiques sont constamment testées,  actualisées et examinées par d’autres scientifiques. Les nouvelles découvertes aident à corriger les inexactitudes et révèlent encore plus de vérité. Cela ne veut pas dire que la vérité ait changé. Au contraire, cela révèle les limites des outils utilisés dues à la technologie défectueuse, la compréhension incomplète ou la mauvaise interprétation de données. Au fur et à mesure que ces outils s’améliorent, la science nous rapproche de la vérité.

La construction des théories scientifiques ressemble à la celle d’une carte. Cette dernière rassemble tous types de données telles que la longitude et la latitude, l’altitude, les voies navigables et le climat pour en faire une représentation cohérente de la réalité. La carte en soi n’est pas la réalité mais une représentation de la réalité. Les cartes scientifiques de la réalité, les théories, doivent être actualisées grâce aux nouvelles découvertes.

Les  motivations égoïstes ainsi que l’erreur peuvent jouer un rôle dans les découvertes scientifiques. Certains avides de notoriété peuvent être tentés de produire des résultats qui les rendraient plus célèbres. Le désir d’obtenir un certain résultat peut provoquer une manipulation consciente ou inconsciente des données. Malheureusement, les exemples de telles données inventées sont nombreux dans l’histoire de la science. Dans l’œuvre de M. Steven Jay Gould The Mismeasure of Man,7  on trouve une chronique qui raconte la manière dont des déformations ont été perpétuées. Cet ouvrage relate comment au XIXème  siècle, la science a fourni des données qui soutiendraient les préjugés existants sur la relation entre la race et l’intelligence.

Bien que la méthode scientifique réduise l’occurrence des préjugés de la part du chercheur, les erreurs aléatoires sont intrinsèques à tout instrument de mesure.  Tout instrument est imprécis, et par conséquent il faut toujours établir une marge d’erreur. Les imperfections de l’homme et de ses méthodes impliquent que les conclusions scientifiques ne seront jamais parfaites. Toutefois, elles s’amélioreront au fur et à mesure que la science s’avance. Bien qu’il faille prendre en compte de telles critiques, elles ne doivent pas nous aveugler au sujet des grandes réussites de la science qui ont révélé le comportement de la nature.

 

La vérité révélée

Les limitations humaines peuvent nous empêcher de comprendre parfaitement les différents aspects de notre expérience, y compris les Écritures et la science. Par conséquent, ce qu’on pense être des conflits pourraient en réalité n’être que des malentendus qui nécessitent un peu de réflexion.  De plus, étant donné que les voies de Dieu sont beaucoup plus élevées que les voies de l’homme, il peut y avoir des vérités qui resteront à jamais cachées et des contradictions qui ne seront jamais résolues. Le professeur Robert Trigg de l’Université de Warwick parle évoque la limitation de notre compréhension :

« Notre raison est une bougie pâle et vacillante, comparée à la lumière de la sagesse de Dieu. Néanmoins, elle a pu nous faire parvenir à une connaissance imparfaite. On peut s’attendre à l’erreur et à une compréhension imparfaite, mais nous sommes à l’image de Dieu et nous pouvons acquérir une certaine connaissance grâce à la science et d’autres opérations de l’esprit humain. »  8

Ce concept se trouve également dans le slogan des Cambridge Platonists, une école de théologiens et de philosophes qui avaient de l’influence à l’époque de la création de la Royal Society:

« La raison est la bougie du Seigneur. » 9

D’après Francis Bacon, le père de la méthode scientifique de l’induction :

« Pour conclure : que personne, sur la base d’une conception peu solide de la tempérance ou par une modération appliquée là où elle n’a pas lieu d’être, ne pense ni ne soutienne qu’un homme peut pousser trop loin ses recherches, ou être trop versé dans l’étude du livre de la parole de Dieu ou dans celle des œuvres de Dieu, c’est-à-dire en théologie ou en philosophie (science). Au contraire, que les hommes entreprennent d’avancer ou de progresser indéfiniment dans l’une ou dans l’autre ; qu’ils prennent seulement garde à mettre en pratique l’une ou l’autre en vue de la charité et non de l’orgueil, en vue de leur utilité et non de l’ostentation ; et enfin que, dans leur manque de sagesse, ils ne mêlent ni ne confondent ces deux savoirs » 10


Notes

  1. John Polkinghorne, “Is Science Enough?” Sewanee Theological Review 39, no. 1 (1995): 11-26.
  2. Ibid.
  3. Ibid. Please also note that this response assumes that the individual has free will.
  4. Colin Humphreys, “The Star of Bethlehem,” Science and Christian Belief  5 (1995): 83-101.
  5. John Polkinghorne, “The Science and Religion Debate: An Introduction,” Faraday Papers, no. 1 (2007),http://www.stedmunds.cam.ac.uk/faraday/Papers.php.
  6. John D. Barrow, The Constants of Nature: From Alpha to Omega—The Numbers that Encode the Deepest Secrets of the Universe (New York: Pantheon Books, 2002).
  7. Steven Jay Gould, The Mismeasure of Man (New York: W.W. Norton & Company, Inc., 1996).
  8. Roger Trigg, « Does Science Need Religion? » Faraday Papers, no. 2 (2007),  http://www.st-edmunds.cam.ac.uk/faraday/Papers.php.
  9. Ibid.

10. Francis Bacon, The Advancement of Learning; Colours of Good and Evil; The Essays (London: Adamant Media Corporation, 2005).

 

 

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