Article 1 sur un total de 2 pour la série :

Réponse à Michel Thys


Dans les deux commentaires à peu près identiques qu’il a posté sur ce blog, Michel Thys a soulevé des questions très intéressantes qui méritent certainement qu’on s’y attarde davantage.

Sur son blog, Michel Thys ne cache pas son athéisme militant, s’appuyant en partie sur la théorie de l’évolution pour défendre ses convictions. Les partisans du nouvel athéisme comme Richard Dawkins utilisent fréquemment le même type d’arguments. Je me réjouis de voir que des non croyants souhaitent s’exprimer sur ce blog, qu’ils continuent de le faire…toujours dans un esprit de respect !

En réalité, bien que profondément croyant, je partage avec Michel Thys un certain nombre de convictions et de constatations. Bien entendu, notre terrain d’entente se limite à ce qui relève véritablement du discours scientifique, nos chemins divergent quand M. Thys pensent pouvoir utiliser la science pour défendre et justifier ses options philosophiques personnelles.
Permettez moi, M. Thyss, de faire à mon tour et en toute courtoisie quelques commentaires sur vos interventions.

« Même en présence d’arguments rationnels et scientifiques, il me semble qu’un créationniste change rarement d’avis, et se cramponne à des “arguments” subjectifs. »

C’est vrai, l’expérience prouve que les créationnistes de longue date changent rarement d’avis. C’est une constatation que des chrétiens évangéliques font également. Ainsi dans Création, évolution, faut-il trancher ? Jean Humbert écrit : « On ne peut guère faire changer d’avis ceux qui ont mûrement réfléchi et pris des positions tranchées. C’est bien connu. Ou alors, il faudrait qu’il passe par une sorte de « conversion ». » Quelles explications peut-on avancer ? Pour ma part j’en vois surtout une : les créationnistes ont été enseigné dans l’idée que croire en une interprétation littérale de la Genèse est du même niveau que celui de croire dans la mort et la résurrection du Christ pour le salut de l’humanité. Ils ont donc besoin qu’on leur explique théologiquement pourquoi ce n’est pas le cas. Les créationnistes ayant vraiment pris la peine d’étudier de manière approfondie les preuves scientifiques de l’évolution sont finalement peu nombreux. Il faut reconnaître que certaines de ces preuves ne sont pas à la portée de tous, et que tout le monde n’a pas forcément le temps d’y consacrer des heures…L’orgueil aussi empêche parfois l’un ou l’autre de changer d’avis. Il faut une certaine dose d’humilité pour reconnaître que sur tel ou tel aspect de sa théologie, on s’est trompé, voire qu’on a entraîné les autres dans l’erreur. Je crois pourtant que cette faculté à se remettre en question est une qualité fondamentale du chrétien véritable.

Cependant, dans la formulation de votre phrase, je crois percevoir un autre aspect du débat qui divise les athées et les chrétiens. Vous pensez peut-être que la foi est quelque chose de subjectif et que la science est elle la garante de l’objectivité ? La place me manque ici pour aborder cet aspect des choses, mais je vous renvoie à la traduction de l’excellent article d’Alister McGrath, ancien athée lui-même, répondant à Richard Dawkins sur ces questions, et plus généralement à ses écrits.

 « Si, au mieux, il reconnaît qu’il y a eu Evolution, et qu’il adhère au “dessein intelligent”, cela revient à passer du théisme au déisme, ce qui revient quasi au même. »

Sur le blog, j’ai déjà mis en évidence la subjectivité d’une telle affirmation. Sur quelle base affirmez vous que le déisme (croyance en un Dieu impersonnel) serait la même chose que le théisme (croyance en un Dieu personnel comme celui des chrétiens) ? L’athéisme serait la seule position philosophiquement défendable ? Pourquoi ne le dites vous pas plus clairement ? Votre formulation trahit les amalgames illégitimes que vous faites,  et  elle est en plus fausse du point de vue de l’expérience. Roger Lefebvre qui intervient régulièrement sur ce blog a un temps adhéré au créationnisme. Après réflexion il a réalisé qu’il s’était trompé, il n’est pas devenu partisan de l’I.D. pour autant. C’est aussi le cas d’un nombre grandissant d’évangéliques qui prennent le temps de réfléchir à ces questions… De plus l’assimilation créationnisme= théisme, Intelligent Design= déisme est tout simplement erronée du point de vue de la définition de ces mots. L’Intelligent Design revendique la nécessité de considérer des interventions miraculeuses d’un « Designer » pour expliquer ce que la science ne sera peut-être jamais capable d’expliquer, c’est donc une croyance interventionniste que l’on qualifierait difficilement de déisme !
Darwin écrivait lui-même :

« Dans mes fluctuations les plus extrêmes, je n’ai jamais été un athée dans le sens de nier l’existence d’un Dieu. Je crois que, alors que je vieillis, agnostique correspond le mieux à mon état d’esprit, mais pas toujours… Il parait absurde de douter qu’un homme puisse être un théiste ardent et un évolutionniste. » Darwin A J. Fordyce, 7 mai 1879.

Une citation parmi tant d’autres qui devrait faire réfléchir tous ceux, croyants ou non, qui pensent que Darwin revendiquerait sa réputation de « père de l’athéisme ».

Je commenterai progressivement le contenu très riche de votre commentaire. Amicalement.


2 Articles pour la série :

Réponse à Michel Thys