Introduction (Benoît Hébert) :

Voici quelques extraits que j’ai sélectionnés d’un article de Peter Enns, théologien évangélique bien connu, responsable du département théologique de la fondation Biologos.

 

« La question de savoir quand la Genèse a été écrite n’est pas nouvelle. Cette question a été un objet d’étude depuis le 18ème siècle. Malheureusement, on a souvent considéré ce développement de façon négative, comme s’il s’agissait là de critiquer un consensus non remis en question par des siècles d’opinions juive et chrétienne. La critique moderne de la Bible est loin d’être sans défauts, et il s’est produit certains déplacements théologiques sans précédent depuis la période pré moderne. Il est pourtant faux de suggérer que les spécialistes et universitaires se sont attaqués à un consensus universel sans débat. L’étude moderne du Pentateuque ne s’est pas développée à partir de rien, et la question de son (ses) auteur(s) a été un défi pour les lecteurs des siècles avant la période moderne.

 

Comprendre quand le Pentateuque a été écrit nous aide aujourd’hui à comprendre pourquoi il a été écrit. Cette question du pourquoi est importante en ce qui concerne la discussion à propos des relations entre la Genèse et la science moderne- que ce soit la cosmologie, la géologie ou la biologie. Mieux nous comprenons les intentions de l’auteur de la Genèse, plus nous sommes à même de saisir comment ce livre est ou n’est pas compatible avec la science moderne. Avoir des attentes illégitimes à propos de la Genèse est peut-être le plus grand obstacle à une discussion fructueuse entre la science, tout spécialement l’évolution, et le christianisme…

 

Le Pentateuque soulève ses propres interrogations :

 

Depuis longtemps, les lecteurs avertis ont remarqué que le Pentateuque nécessite quelques explications. Ce document soulève ses propres questions à propos de la cohérence, de l’ordre logique, et tout spécialement sur la façon dont il aurait pu être écrit par un seul homme : Moïse, au milieu du deuxième millénium. La Genèse a donné du travail aux interprètes de la Bible depuis le temps de Jésus, et voici quelques questions qu’ils se sont posées :

 

  • Pourquoi y a t-il deux histoires clairement différentes de la création au tout début de la Bible (Genèse 1-2 :4a et 2 :4b-25)
  • Si Adam et Eve étaient les premiers hommes, d’où vient la femme de Cain et de qui avait-il peur, après avoir tué son frère ? (Genèse 4)
  • Pourquoi l’histoire du déluge est-elle si répétitive ? (Genèse 6-9)
  • Pourquoi y-a-t-il deux histoires de la dispersion des nations ? (Genèse 10 et 11 :1-9)

 

Toutes ces questions et bien d’autres sont soulevées par une lecture attentive, et pas par le scepticisme de lecteurs fidèles de la Bible depuis la venue de Jésus. …En ce qui concerne la Genèse, les spécialistes modernes ont poussé les choses beaucoup plus loin que ceux qui les ont précédés, et ont peut juger leurs efforts par leur propre mérite. Mais ils n’ont pas créés le problème- le Pentateuque l’a fait…

 

Le point de départ de l’étude moderne de l’Ancien testament : les deux noms de Dieu.

 

Pourquoi Dieu a-t-il deux noms dans la Genèse ? On peut dire sans exagérer que la réponse à cette question a été le point départ de l’étude moderne du Pentateuque…

 

La Genèse et les histoires de la création font partie d’une collection plus vaste d’écrits à motivation théologique qui répondent à des questions anciennes à propos de l’identité et de la définition d’Israël, et pas à des questions contemporaines d’intérêt scientifique. C’est pourquoi, les lecteurs chrétiens aujourd’hui ne devraient pas entraîner la Genèse sur un terrain scientifique. Ils sont au contraire plus bibliques quand ils suivent la trajectoire des Israélites revenus de l’exil qui se posent leurs propres questions à propos de leur définition en tant que peuple de Dieu : Au regard de qui nous sommes et de où nous sommes, que ces textes anciens nous apprennent-ils en tant que peuple de Dieu aujourd’hui ? »