J’ai particulièrement apprécié le dernier dossier du magazine « La Recherche » intitulé « Néandertal, notre nouvel ancêtre »

Ce numéro fait état des dernières découvertes génétiques dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises sur ce blog, avec les articles de Dennis Venema, généticien travaillant avec la fondation biologos, et Pascal Touzet, professeur en génétique évolutive à l’université de Lille.(rubrique génétique)

 

Ce dossier présente bien entendu les dernières découvertes :

 

  • « La publication en 2010 du séquençage de l’ADN de Néandertal révèle que les Européens et les Asiatiques actuels partagent avec lui 4% de leur génome.
  • Cette publication est le fruit d’un travail complexe qui a porté sur l’ADN de trois fossiles différents.
  • Il faudra séquencer le génome d’autres hommes, fossiles et actuels, pour en savoir plus sur notre parenté avec Néandertal. »

 

Un certain nombre de paléoanthropologues restent tout de même prudents à propos des conclusions.

 

Bruno Maureille (CNRS Bordeaux)

«  Néandertal peut être l’un de nos ancêtres

 

…Vous semblez prudent vis-à-vis de cette interprétation du génome ?

J’accepte ces résultats là parce qu’ils sont très sérieux et très bien menés méthodologiquement. C’est l’interprétation la plus simple en l’état actuel des connaissances. Mais je ne peux pas m’empêcher de penser qu’une partie des résultats peut être due à une méconnaissance de l’évolution des hommes modernes et des Néandertaliens. Car il est tout à fait possible que nous ayons une vision biaisée…

 

Les Néandertaliens pourraient-ils appartenir à notre espèce ?

Pourquoi pas. Personnellement, je considère que nous n’avons pas assez de données, et notamment pas assez de fossiles pour les exclure. »

 

Eva-Maria Geigi, paléogénéticienne, CNRS Paris

« Nous manquons de données pour comprendre le métissage

Le groupe de travail de Svante Pääbo a réussi l’exploit de séquencer le génome d’une espèce éteinte depuis environ 30 000 ans. Ce travail est enthousiasmant, impensable il y a encore dix ans. L’équipe a identifié des indices d’un métissage entre Néandertaliens et hommes modernes…Comme c’est souvent le cas, d’autres modèles plus compliqués peuvent aussi expliquer les données. Les hypothèses proposées correspondent aux plus parcimonieuses, qui ne sont pas toujours les plus proches de la réalité… »

 

Carles Lalueza-Fox (paléogénéticien Barcelone)

« Nos différences avec Neandertal ne sont pas seulement dans nos gènes. 

 

…Prenons le cas du chimpanzé. Nous avons beau avoir séquencé son génome, nous ne comprenons pas beaucoup des différences morphologiques et cognitives les plus évidentes entre lui en nous…l’importance n’est pas forcément dans le message que constituent les gènes, mais dans la manière dont ce message est délivré… »

 

Ce dossier contient aussi toute une analyse à propos de l’homme de Denisova

 

  • « L’analyse du génome complet de l’homme de Denisova, publié fin 2010, indique qu’il s’agit d’une nouvelle lignée humaine proche de l’homme de Néandertal.
  • Elle se serait séparée de l’homme moderne il y a 800 000 ans et de l’homme de Néandertal il y a 650 000 ans.
  • Il y a probablement eut métissage entre l’homme de Denisova et les ancêtres des mélanésiens actuels. »

 

L’article le plus surprenant est celui de Valéry Zeitoun, paléontologue au CNRS, spécialisé dans les fossiles asiatiques.

 

  • « L’idée que l’homme moderne est né en Afrique avant de conquérir le monde repose sur très peu de données.
  • Des fossiles découverts récemment en Asie indiquent la présence d’hommes modernes il y a 195 000 ans sur ce continent encore peu exploré.
  • Il se pourrait que ces hommes modernes asiatiques résultent de l’évolution sur place de groupes humains plus anciens. »

 

Cette analyse est-elle celle d’un chercheur isolé qui étudie des spécimens asiatiques et qui aimerait remettre en cause les origines africaines d’Homo Sapiens ? J’avoue que cette remise en cause du peuplement du globe à partir de l’Afrique tel qu’il était présenté dans le documentaire d’Arte m’a laissé perplexe. L’analyse de l’ADN des populations actuelles confirme bel et bien ce scénario, ainsi que la diversité génétique importante en Afrique, qui s’explique très bien si elle est le berceau de l’humanité.

 

Bref, si ces questions vous préoccupent, procurez-vous ce dossier !!